La Bella Addormentatta

Publié le 5 Avril 2013

Pas de recommandations ciné pour la semaine dernière, mon emploi du temps a été un peu creux...mais me revoilà avec trois critiques et une interview, rien que ça!

Pour commencer celle d'un film italien, La Belle endormie, réalisé par Marco Bellocchio ( Le Diable au corps) qui sortira mercredi 10 avril.

A suivre, dans un autre genre, un certain Mariage à l'anglaise...

Marco Bellocchio revient avec un film au titre que l’on dirait tout droit sorti d’un conte. Mais c’est une histoire bien encrée dans le réel qu'il nous narre, celle d’Eluana Engaro, une jeune femme, plongée dans le coma pendant 17 ans, que son père a décidé de débrancher. Cette affaire secoua l’Italie en 2008, opposant les pour et les contre, confrontant deux visions de ce qu’est « vivre ». C’est en tout cas ce qu’essaie de faire Bellocchio dans son film, en faisant évoluer plusieurs personnages bataillant avec la vie, une jeune activiste dévastée par la mort de sa mère, une toxicomane dont la vie ne tient qu’à un fil ou encore un homme qui s’empêche de vivre pour veiller sur son jeune frère bipolaire. Le réalisateur interroge ainsi la valeur de la vie et surtout ce que signifie vraiment « vivre ». A qui est-il plus légitime d’abréger l’existence, Eluana qui n’a pas ouvert les yeux, fait un mouvement ou dit un mot depuis 17 ans « mais pourrait porter un enfant » ou à Rossa qui se détruit à petit feu et répète sans cesse qu’elle est déjà morte ?

Le débat sur l’euthanasie, qui prend place en arrière plan, n’est qu’un prétexte à Bellochio pour parler de la vraie Belle endormie, l’Italie, dans laquelle les italiens se sentent pour de raisons politiques, sociales, existentielles, comme prisonnier d’un coma, retenus dans une société immobile, comme le prouve par exemple la scène digne d’un péplum montrant les sénateurs se baignant dans les termes. Mais la Belle endormie semble ironiquement à travers ce film le cinéma italien lui-même. S’il est toujours empli d’une révolte face à la toute puissance d’une religion qui vient se mêler aussi bien aux affaires politiques que privées, s’il a toujours des airs de grandiloquence dans sa musique opératique, dans sa façon de décrire le réel, il a manifestement perdu de sa splendeur. Malgré son idée de départ au fort potentiel dramatique, le long-métrage est loin de la fresque passionnelle promise, souffrant d’une forme insipide, avec des cadrages banals et plats et surtout une image délavée qui le semble tout droit calibré pour un format télé.

Le propos enflammé ne parvient jamais à prendre la puissance qu’il mérite et s’installe rapidement dans une routine ronronnante où les pour et les contres ne sont tellement pas différents, qu’à la fin on a du mal à discerner justement qui l’est et qui ne l’est pas, comme on a du mal à s’attacher aux personnages qui deviennent alors assez similaires. Certaines intrigues se perdent même dans l’ensemble, jusqu’à devenir anecdotiques. Si Bellocchio parvient à nous séduire encore un peu c’est par ces quelques moments de grâce qui rappellent à nous l’âge d’or du cinéma italien, notamment à travers le personnage d’Isabelle Huppert, grande actrice paralysée par le long sommeil de sa fille, qui la transforme ainsi en figure religieuse de mater dolorosa ou de « Divina Madre » comme elle est appelée dans le film.

La Bella Addormentatta

Rédigé par Kamille

Publié dans #Critiqueciné

Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article